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Frère cadet du dessinateur André Foy, Roger Foy fabrique d'étranges statuettes de laque rouge, sculpte dans l'ivoire des pommeaux de canne grimaçants, façonne des ludions en forme d'épingles de cravate et de boutons de manchette. "Il applique, note Jean Galtier-Boissière, avec un goût très sûr, l'humout à l'art décoratif. La gentry se dispute à prix d'or ses bijoux, ses breloques et ses ommeaux de cannes; et, pour une fois, elle n'a point tort."

Roger Foy invente tout un monde de petits monstres qu'il empale au bout d'une épingle ou colle en chaton sur une bague. "Ces êtres fantasques et divins, écrit son frère, il les a construits en pleine imagination; il les a pour ainsi dire extraits de lui-même, de ses visions toutes spontanées sans recherches laborieuses; elles semblaient plutôt s'imposer à lui."

Il expose au Salon des Artistes humoristes, au Salon des Indépendants, où Louis Vuitton remarque son travail, puis est invité en 1925 au Salon des Arts décoratifs et régulièrement au Salon de l'Araignée.

"C'est par contre, écrit Jean Bernier dans La Gazette du Bon Ton, un humour carrément britannique qu'inspirent les broches et les breloques de Roger Foy. Là, l'artiste voulut rire et faire rire, et ses bijoux sont des bijoux de vacances, propres aux chandails et aux mèches folles. Métis grotesque des deux plus grotesques oiseaux : le pélican et le toucan, l'oiseau de Roger Foy se perche sur la broche; il y médite ou se chamaille avec son frère, pour moeux faire rire la jeune fille qui le portera ou le regardera."

"Cet occultiste sans le savoir, rappelle Robert Frey, touchait les pierres et les métaux ptécieux avec un respect d'initié. De là le caractère si nouveau des bijoux qu'un des premiers, avec Raymond Templier, il a façonnés et qui devinrent si vite à la mode et qui furent tant imités, d'une façon souvent si sotte."

"A l'âge où un homme commence à sentir sa maturité naissante donner une forme à son oeuvre et un but précis à ses efforts, est-il pour ceux qui ont partagé avec lui le même chemin que de le voir soudain disparaître? Roger Foy a quitté les siens et ses amis. Après le peintre La Patellière, et pour la deuxième fois cette année, une génération d'artistes a conduit au cimetière un de ceux qu'elle estimait pour l'expression de son curieux talent et les rares qualités de son cœur. Ceux qui ont bénéficié de l'amitié de Roger Foy, frère du peintre André Foy, appréciaient en lui, à travers le calme et l'équilibre de son jugement, le goût qu'il avait pour certain genre de comique étrange. il aimait l'humour féerique, le sérieux farce que les clowns anglo-saxons empruntent à la folie, et cette affection pour le bizarre s'est traduite de la façon la plus variée dans son art. Les bijoux qu'il dessinait et ciselait lui-même montraient l'amour d'un artisan de la tradition pour les fins outils et la matière précieuse Cet artiste, dont le métier n'était point de ceux qui touchent les masses, réservait à des amateurs éclairés ses bagues et ses pendentifs qui prendront place quelque jour dans les collections."
Jean Galtier-Boissière, Le Crapouillot, juin 1932.

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